Qui était Jean le Baptiste ? Pas un notable, ni un responsable religieux. Nous pourrions dire que c’était un marginal aux vêtements bizarres et au régime alimentaire pas ordinaire. Et pourtant il attire les gens qui veulent se convertir. Nous, nous disons qu’il est le dernier grand prophète. Lui, il se reconnaît simplement comme cette voix qui crie dans la désert. Pas de longs discours. Seulement : “Convertissez-vous. Le Royaume de Dieu est tout proche de vous”.
Baruc, pour sa part, interpelle la ville sainte : “Jérusalem, quitte ta robe de tristesse et de misère…”. Aujourd’hui nous pouvons actualiser cette parole : “Eglise de France, communauté de Ste Elisabeth, quittez cette lassitude, ce découragement, cette tristesse que peut faire naitre en vous ces 2 années de pandémie, cet abattement que peut susciter le rapport de la CIASE, ou encore quelque paroles malheureuses. Redressez-vous, relevez la tête, vous toutes et tous qui subissez le poids de la solitude, de la maladie, du grand âge. Vous toutes et tous qui portez le fardeau d’une séparation familiale, du chômage, de la précarité.
Oui, c’est une invitation à l’espérance que Baruc nous envoie en ce 2ème dimanche de l’Avent. Non pas “avant”, avec un a, mais A-V-E-N-T, ce qui signifie avènement. A la fois avènement du Fils de Dieu qui se fait homme en Jésus et avènement, retour du Fils de l’Homme à la fin des temps.
Espérance ? … Mais comment, dans certaines situations très difficiles, très douloureuses, réussir à imaginer qu’un monde plus beau est possible ? …Même si c’est difficile de l’imaginer nous pouvons y croire, parce que notre foi nous permet d’affirmer que Dieu ne nous oublie pas, il est à nos côtés. Certes nous ne le voyons pas agir, nous ne percevons pas forcément son action au quotidien. Il est discret, et sa principale action est de nous donner son Esprit et sa force pour que nous vivions la solidarité, la justice, la fraternité; pour que nous soyons ensemble acteurs de l’avènement d’un monde plus beau, dans lequel chacun ait sa place, se sente respecté, puisse vivre et travailler dans la dignité.
Si Dieu nous aide et nous soutient, il ne fait pas à notre place. Il met en nous sa force d’Amour pour prendre soin personnellement et collectivement de nos sœurs et de nos frères, et de la création.
Alors, vous allez me dire : c’est bien beau de croire en un monde d’Amour et de Paix à la fin des temps, mais nous, c’est aujourd’hui que nous avons besoin de vivre mieux.
Eh! bien, cela commence à se réaliser quand nous ouvrons notre esprit et notre cœur, quand nous ouvrons nos mains, pour aller à la rencontre des autres, quand nous acceptons de changer notre regard pour accepter nos différences sans condamner ou stigmatiser telle ou telle personne ou tel groupe, quand nous agissons pour changer ce qui ne va pas.
Ecoutons bien le prophète. Il ne dit pas : Le Seigneur prépare le chemin pour vous. Il dit : Préparez le chemin du Seigneur. Ce monde d’Amour et de Paix n’adviendra pas sans nous. Il nous faut retrousser nos manches et participer à cet avènement au travers de nos petits gestes du quotidien, nos relations interpersonnelles, comme au travers d’actions avec un collectif, une association, un syndicat, etc… Toutes ces organisations qui ont le souci de prendre soin de tous et de chacun.
C’est à une conversion permanente que nous sommes invités. Nous décentrer de nous-mêmes pour nous tourner vers Dieu et vers nos sœurs et frères. Pour voir l’avènement de ce monde nouveau il nous faut mettre en œuvre le grand chantier évoqué dans les paroles du prophète Isaïe : Rendre doit, aplanir, supprimer les obstacles. Non, Dieu ne nous demande pas d’envoyer une armée de buldozers pour tout niveler. Sa création est trop belle, avec ses collines, ses montagnes, ses vallées…
Le ravin qu’il nous demande de combler, c’est celui qui nous sépare de notre voisin de palier, de notre collègue de travail, de celui qui n’a pas la même couleur de peau ou la même religion que nous, et même parfois le fossé qui nous empêche de communiquer avec l’un ou l’autre dans notre communauté. Combler aussi, ou au moins réduire très significativement le toujours plus grand abîme entre les revenus des plus riches et ceux des plus pauvres. Que ce soit entre individus ou entre pays.
Les terrains rocailleux qu’il nous faut aplanir, ce sont toutes ces difficultés qu’il nous faut dépasser ensemble. Par exemple ces discriminations qui empêchent certains d’accéder à leurs droits, de trouver un travail, de pouvoir faire vivre dignement leur famille…
Les collines et les montagnes qu’il nous faut abaisser, ce peut être aussi renoncer à nous croire supérieur aux autres et détenteurs de la vérité.
Bref, que ce soit un ravin, une colline ou des rochers en travers de la route, ce qu’il nous faut supprimer c’est tout ce qui nous empêche d’être en relation avec Dieu et avec nos frères.
En ce temps où l’Eglise elle-même, avec la démarche synodale, s’engage sur un chemin de renouveau, entrons nous aussi sur cette route de conversion, en nous demandant ce que nous pouvons changer en nous pour vivre davantage ajusté à Dieu qui se donne à nous en Jésus. Renonçons à tout ce qui encombre nos vies, pour faire de la place et pouvoir accueillir Dieu qui se fait proche de nous, à Noël, mais aussi chaque jour.