DIMANCHE 04 OCTOBRE 2020 – LA PIERRE ANGULAIRE … ET LA DIACONIE PAROISSIALE – HOMELIE DE DOMINIQUE HOUSSAY, Diacre

Le texte d’Isaïe n’est pas réjouissant, pas plus que le texte d’Evangile. Et, en les écoutant, souvent nous sommes tentés d’y voir une condamnation de la vigne qui donne de mauvais fruits ou des vignerons meurtriers. En faisant une transposition à nous-mêmes et nous demandant si nous ne sommes pas à notre tour cette vigne et ces vignerons.

Bien sûr, nous ne sommas pas parfaits et nous avons notre part de faiblesse, de lâcheté, de trahison, mais est-ce là le seul message à entendre ? Nous savons que Dieu n’a pas renoncé à son projet d’amour pour l’humanité. Le peuple choisi a été défaillant, mais il a confié mission à un autre peuple, universel : l’Eglise. Et puis la pointe de l’évangile n’est pas dans l’accumulation des méfaits des vignerons infidèles, mais dans le final : La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle :c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux !

Alors, aujourd’hui, si vous le voulez bien, regardons, non pas les manquements de toute sorte, mais regardons tout ce qui se vit de beau, de bon, tous les bons fruits que produisent la vigne-Eglise et nos vignes personnelles, même hors du cercle de l’Eglise.

De belles choses il s’en est vécu beaucoup pendant le confinement et depuis. Il s’en vivait déjà beaucoup auparavant, Mais ils étaient beaucoup moins mis en lumière.

Quelques uns d’entre nous ont noté ce qu’ils ont repéré de positif dans cette période, et ils acceptent de nous le partager.

Jean-François et Marie-Thérèse, faites-nous part de vos réflexions.

  • Possibilité de prendre du temps pour soi,
  • Se reposer, se retrouver, méditer, lire
  • Prendre du temps en couple : marcher ensemble, prier ensemble
  • Prendre des nouvelles des uns et des autres + de 100 coups de fil
  • Continuer les réflexions en A C O par courrier ou téléphone
  • Célébrations eucharistiques à la Télé : sur le site du diocèse, sur le site de la paroisse
  • Réflexion sur les textes des Dimanches, les envois de Vast-Amour
  • Entraide entre voisins
  • Des étudiants qui se mettent au service des plus démunis : ( maraudes, distributions de denrées)
  • Moins de pollution en général
  • Moins de pollution sonore ( très peu de bruit sur la rocade le dimanche)
  • Amélioration de la qualité de l’air
  • Réflexion de Marie-Thé : « Cette pandémie et ce confinement m’ ont fait touché du doigt l’éventuelle séparation par la mort : aussi je n’ai jamais autant dit je t’aime à Jean-François»

Les plus âgés de nous, habitués à donner, se sont parfois retrouvés dans la situation de recevoir. Lucienne, dis-nous comment tu as vécu et relu cela.

Le confinement, un renversement, on passe du donner au recevoir

  • Le confinement, je l’ai bien vécu. Temps pour se laisser porter, lâcher prise.
  • J’ai été très accompagnée par mes amies qui se sont relayées, mes enfants et les petits-enfants ;
  • Les appels téléphoniques reçus et donnés. J’ai aussi repris des liens avec des personnes très âgées qui ont été point d’appui pour moi. Avec elles, j’ai fait un bout de chemin de la vie, nourriture dans la foi, l’engagement.
  • Double fidélité en Jésus-Christ et avec mes frères en humanité, mes voisins proches très présents, lesmagrébins qui m’ont demandé si j’avais besoin de quelque chose.
  • Lumière plus présente que les ténèbres, regard tendre du cœur, don de Dieu et de l’Evangile.
  • Donner, recevoir, joie profonde et grande douceur.
  • Seigneur, je te rends grâce pour toute cette Vie, Joie profonde qui habite les cœurs, et qui se nommeAmour, cet Amour qui se donne et se reçoit, grâce de croire au Christ ressuscité et ressuscitant.

La vie dans le quartier, dans les tours, s’est trouvée impactée par ces gestes de solidarité, comme l’a bien remarqué Christiane :

  • Dans le quartier, pendant le confinement, c’était calme. Les gens disaient bonjour, ils allaient etvenaient…On n’entendait pas les enfants, ils n’étaient pas excités mais calmes et polis.
  • On vivait une autre dimension, on ne sentait pas d’agitation.
  • Une solidarité au ras du sol se vivait : « J’étais dans l’ascenseur, il s’arrête au 7ème étage, troishommes hésitent à rentrer. L’un d’eux dit : « On met notre masque parce qu’il y a la dame ». Cela m’a impressionné parce que ces gens bien cassés ont exprimé un regard et une attitude d’humanité »
  • L’incertitude qui engendrait la peur enfermait un peu chacun de nous, dans nos questions.
  • On se retrouvait tous au même niveau et chacun aspirait à retrouver du souffle en rencontrant les autres.
  • « Des voisins sont venus nous apporter du pain, des gâteaux qu’ils avaient fabriqués. Ils nous demandaient si on avait besoin de quelque chose. Un jour l’un d’eux nous donne une pizza. »
  • Il n’y avait plus d’étrangers, on était tous des humains.
  • Merci Seigneur pour cette humanité qui se manifestait de façon plus vivante. On se sentait plus frères en humanité.

Ceci rejoint ce que dit Paul dans Galates 3,28 « Il n’y a plus ni juif ni non juif, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus ni homme ni femme car vous êtes tous un en Jésus-Christ ».

Pour d’autres, cela n’a pas été simple tous les jours, car leur profession leur demandait de rester enactivité. Ils nous ont permis de tenir le coup. Merci à eux. Anne, tu peux nous en dire un peu plus…Le confinement…

  • J’ai continué à travailler au milieu des peurs des collègues et des clients…
  • J’ai vu la solidarité se mettre en place entre nous pour aider les secteurs où l’absentéisme était important pour garder les jeunes enfants… Chacun s’est adapté à un autre rythme ou à un autre poste qui était jusque là peu connu.
  • J’ai pu ralentir le rythme de ma vie pas comme ceux qui étaient confinés mais je n’étais plus pollué par les diverses sollicitations extérieures sorties, réunions…. Et j’ai pris le temps de parler partager ou jouer en famille, d’appeler les uns et les autres pour prendre des nouvelles, de rendre service à ceux qui en avaient besoin dans la famille ou avec les voisins. J’ai vu aussi la reconnaissance de la clientèle envers mes collègues hôtesses de caisse qui d’un coup n’étaient plus transparentes. Elles existaient, malheureusement ça a vite cessé dès que les gens ont repris leurs habitudes…je me rends bien compte que certains ont changé leurs habitudes, pris des décisions importantes et d’autres sont revenus à l’essentiel… Je suis revenue à l’essentiel, j’ai pris beaucoup de recul sur mon travail et j’y ai retrouvé du sens en m’investissant pour mes collègues.
  • Malgré tout, cela reste dur à vivre de ne pouvoir embrasser mes parents de les tenir à distance, pour les protéger, par amour…

Certains ont apprécié ce que peut apporter dans des ces périodes le fait d’appartenir à un mouvement d’Eglise, à un groupe de réflexion. Possibilité de soutien par le partage autour de la Parole et dela vie. L’Evangile au bas des tours à continué… par téléphone, comme certaines rencontres d’ACOou de VEA. On a pu goûter, apprécier de faire Eglise autrement.

Françoise, dis-nous ton expérience.

  • “Quand 2 ou 3 sont réunis en mon nom, je suis là au milieu de vous”.
  • Cette phrase de l’Évangile raisonne fortement en moi depuis le début de la crise sanitaire. Elle m’aaidée à discerner ce qui nourrissait ma foi, autrement que ma relation quotidienne à Dieu. Meslieux de vie d’Église que sont les équipes dans lesquelles je suis engagée me sont apparues commedes lieux importants de ressourcement.
  • Grâce à ces “communautés de base”, j’ai vécu un temps de prière en visioconférence le soir de la veillée pascale. Cela m’a aussi incité à réunir quelques personnes pour assister à la messe télévisuelle. Nous n’étions pas de simples téléspectateurs, nous étions une petite maisvéritable communauté d’Église qui s’accueillait, priait ensemble et partageait son vécu du moment.C’est une vraie richesse que je souhaite continuer à vivre et aimerait voir se développer; j’ai une pensée particulière pour toutes celles et tous ceux que je rencontre parfois dans le quartier et qui ne rejoignent plus la communauté paroissiale depuis le confinement et qui se sentent délaissés.

Oui, merci, Seigneur, merci pour toutes ces merveilles dont tu fais de nous les témoins et les acteurs. Merci, car ce n’est pas à cause de nos mérites que cela est rendu possible, mais bien parce que la pierre angulaire sur laquelle se bâtit ce royaume d’Amour, c’est ton Fils, Jésus-Christ, rejeté, tué comme un malfaiteur, mais ressuscité et vivant.

A nous de résister à la tentation de devenir les propriétaires de la vigne dont nous ne sommes que les serviteurs, chargés d’en remettre les fruits en temps voulu. Si nous manquons à notre mission, Dieu la confira à d’autres, et son projet aboutira avec eux.

Mais la pierre rejetée qui devient pierre angulaire me fait penser aussi à tous ces …”pauvres”, entre guillemets, ces personnes fragilisées, qui sont trop souvent laissées de côté; parfois, malheureusement par l’Eglise elle-même. Pourtant Jésus n’a pas choisi comme disciples des scribes ou des docteurs de la loi, mais de simples pécheurs, et même un publicain. Il s’est laissé approché par des personnes de mauvaise réputation, et il s’est fait proche des malades, il a touché le lépreux. Ne voulait-il pas nous montrer par là que c’est avec ceux-là qu’il voulait inaugurer son royaume, et que c’est sur eux, nouvelles pierres angulaires, qu’il nous faut continuer de le bâtir aujourd’hui. Bâtir avec eux et non pour eux. C’est ce que semble dire le pape François dans “La joie de l’Evangile”. Il nous dit désirer« une Église pauvre pour les pauvres. Ils ont beaucoup à nous enseigner, dit -il. 

Il est nécessaire que tous nous nous laissions évangéliser par eux. “La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devantnos yeux !”