La fête de la Toussaint intervient dans un contexte particulier d’épreuves : épreuve de la foi, épreuve du sang, du martyr comme à Nice aujourd’hui, du sentiment de persécution de croyants, de tout croyant, de l’absolutisme des formes de libertés inconsidérées. C’est un peu ce contexte historique qui a prévalu à l’écriture de l’Apocalypse de St Jean sur l’Ile Patmos. Attention, il faut bien comprendre que c’est un texte codé et imagé, voilé qui nous dévoile une vérité, celle de l’Amour qui reste le plus fort, qui rend saint.
Jean nous parle d’une foule de 144000 personnes marqués du sceau de Dieu, c’est la foule immense des baptisés aux quatre coins du monde, symbolique du chiffre 12 multiplié par lui-même et élevé par millier. C’est donc TOUTE l’Eglise éprouvée à travers ses chrétiens, qui ne cesse de porter du fruit. Jean écrivait aux chrétiens persécutés ou désespérés. Et son message est de donner de l’espérance et de l’endurance. En perspective, il y a une autre foule immense de toutes nations et peuples, de la fraternité universelle, qui n’ont pas de marque, vêtus de blanc, parce qu’ils ont blanchi leurs robes par le sang de l’Agneau. C’est-à-dire, encore le sang du martyr, ou de l’amour qui vit au-delà de la mort.
Nous célébrons donc la Toussaint dans un contexte de nouveau confinement. Ce qui, on peut le comprendre, renvoie pour beaucoup à la tristesse. C’est également un contexte Où nous pleurons la mort de citoyens victimes de terrorisme, où de véritables musulmans souffrent en eux-mêmes de forcenés fanatiques qui n’ont d’autre langage que la violence. Nous pensons à Samuel Paty, à Vincent, Simone et la 3evictime des attentats de Nice. Mais aussi à tous les agents d’Etats qui subissent la barbarie. Nous sommes d’ailleurs dans une société où le visage de la violence est multiforme : violence verbale, physiques ou idéologiques. Et malheureusement dans ce contexte on comprend que la fête d’Halloween où on joue avec la mort et le sort, est très contradictoire avec la réalité du sang qu’on ne peut pas supporter. Les enfants grandissent dans cette idée de jeu et nous pleurons quand cela devient réel.
Oui elles sont nombreuses ces personnes qui pleurent et qui se sont ajoutées à tous ceux qui ne cessent de pleurer leurs conditions de souffrances, leurs conditions de vie. Tous ceux qui sont persécutés, pour la justice, ceux qui sont insultés ou moqués dans leur vie de foi, ceux qui sont victimes de calomnie ou de délation à cause de leur foi, ou même parce qu’ils refusent la compromission et de faire comme les autres, pour être esclave de la mode, de la technologie. Tant chez les enfants (qui n’ont pas les mêmes divertissements), les jeunes (qui n’ont pas les mêmes façons de concevoir les relations affectives), les adultes (qui comprennent différemment la liberté et la morale).
Pourtant c’est la Toussaint, où nous célébrons non pas la mort, mais la vie, non pas le désarroi, mais l’espérance. Les saints, ces hommes et femmes de ce monde, passés par bien des épreuves. Ces saints connus et inconnus de l’histoire, qui ont vécu le quotidien avec leur foi et leurs doutes. Une chose leur est commune : ils sont restés fidèles à la Miséricorde de Dieu ; Mieux encore, ils ont donné à voir d’eux une vie pleine de miséricorde. C’est-à-dire, un cœur sensible à la misère des autres. Et la parole de Jésus dans l’Evangile va jusqu’à toucher le concret de toutes ces souffrances justement pour faire jaillir un mot fort « Heureux ».
Quand Jésus dit « heureux ceux qui pleurent », on a peut-être envie de lui répondre, mais Seigneur, qui a envie de pleurer ainsi. Souffrir ne rend pas heureux. Or il ne s’agit pas d’un encouragement à la souffrance, mais d’un encouragement dans la souffrance. Rejoindre alors toute souffrance et comprendre le message qui demeure le plus fort. Comme s’il disait « soyez heureux d’être forts ». Soyez revêtus de la même force dont sont comblés ceux qui sont pauvres de cœurs, ceux qui sont doux, ceux qui aiment et préfèrent la justice à tout, ceux dont le cœur est sensible à la misère des autres, ceux qui ont le cœur pur et vrai, qui n’ont pas une double personnalité, ceux qui aiment la paix. Et ceux-là sont plus nombreux aux quatre coins du monde, en toute religieux éclairé de l’amour de Dieu, qui établit son règne de paix, de grâce et de sainteté en nous, maintenant et pour toujours. Amen !